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Les vices cachés


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Les vices cachés


Les vices cachés peuvent être définis comme tout défaut caché de la chose, qui la rend impropre à son usage. En matière de vente, l'article 1641 du Code civil, stipule que "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus".
A côté des vices structurels, il y a les vices fonctionnels. Depuis un arrêt du 18 novembre 1971, la Cour de cassation a reconnu que le vice caché pouvait également comprendre les vices fonctionnels.

Les différents régimes des vices cachés

On peut distinguer différents régimes de vices cachés suivant que l’on se trouve en matière de contrat de vente (art.1641 C.civi.) , en matière de contrat de bail (art. 1721 C. civi.) ou en matière de contrat d’entreprise (art. 2270 C. civil).
(Voir l'excellente étude réalisée par Julie Dewez, assistante au centre de droit des obligations de l'UCL, "Le régime des vices cachés" Revue générale de droit civil, RGDC, 2008, pp.47)

La cour d’appel de Mons a été saisie d’une question préjudicielle (Arrêt du 24 mars 2005), dans laquelle les appelants faisaient valoir que l'article 1648 du Code civil viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il subordonne l'action en garantie des vices cachés en matière de vente au respect du bref délai, alors même qu'une telle exigence n'est pas requise pour les actions en garantie des vices cachés reconnues dans d'autres contrats (bail, entreprise), ni en matière quasi-délictuelle, et sollicitent donc que la question soit posée à la Cour d'arbitrage, aujourd'hui Cour constitutionnelle.

La Cour a considéré qu'en l'espèce il apparaît de façon suffisamment claire, que les situations juridiques visées ne sont pas comparables, ce qui explique qu'elles soient soumises à des règles juridiques différentes;

Qu'en matière de vente, le bref délai exigé pour l'intentement de l'action se justifie, d'une part, par le fait que l'écoulement du temps rend difficile la détermination de la date d'apparition du vice (la cause de celui-ci doit être antérieure à la vente) et, d'autre part, par la sauvegarde des droits du vendeur, qui doit pouvoir exercer un recours contre son propre fournisseur (DE PAGE, Traité, T. IV, n° 182);
Que le fait de savoir si le vice préexistait ou non à la conclusion du contrat est spécifique au contrat de vente;

Qu'en matière de bail, le bailleur est tenu de la garantie des vices cachés, peu importe que la cause du vice soit antérieure au contrat ou apparue durant celui-ci (DE PAGE, T. IV, n° 624); Qu'il en va de même en matière de contrat d'entreprise, pour lequel les vices ne pourraient par définition être antérieurs à l'exécution des travaux;

La cour constate que la différence de traitement entre le contrat de vente et ces deux autres contrats est justifiée; tout en rappelant que la Cour de cassation a déjà décidé que l'article 1648 du Code civil n'est pas applicable en matière de contrat d'entreprise.

Qu'enfin, la Cour considère qu’il n'est pas adéquat de comparer les régimes de garantie des vices cachés en matière contractuelle et la responsabilité d'une chose vicieuse en matière quasi-délictuelle, dès lors qu'ils relèvent de situations et de mécanismes juridiques différents (en ce sens Comm. Mons, 28 novembre 2000, R.D.C. 2002, p. 142);
Elle conclut, qu'il n'y a donc pas lieu de poser de question à la Cour d'arbitrage (actuellement Cour constitutionnelle)

Nous proposons de vous décrire brièvement ces trois catégories de régime de la garantie des vices cachés.
Si vous souhaitez aprofondir cette matière, nous développons plus amplement cette matière à travaux nos banques de jurisprudence.

1. Garantie des vices cachés en matière de vente :

En matière de vente, la garantie des vices cachés résulte de l'article 1641 du Code civil, qui stipule que "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus".

Depuis l’arrêt du 18 novembre 1971, la Cour de cassation a reconnu que le vice caché pouvait également comprendre les vices fonctionnels : « le vice caché de la chose vendue, qui oblige le vendeur à garantie, peut être un vice qui, même s’il n’affecte pas intrinsèquement la chose, la rend impropre à l’usage auquel, à la connaissance du vendeur, l’acheteur la destinait ».
Suite dans notre chronique de jurisprudence.
Pour approfondir la question, voir nos banques de jurisprudence.

2. Garantie des vices cachés en matière de bail :

En vertu de l’article 1721 du Code civil, le bailleur est tenu de fournir garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêche l’usage.
L’action du preneur en matière de vices cachés suppose un manquement du bailleur à son obligation d’assurer une jouissance paisible du bien au preneur.

On définit le vice comme tout défaut, tout inconvénient, toute déficience quelconque de la chose elle-même, qui la rend impropre à l’usage auquel elle est normalement destinée, qui supprime ou diminue cet usage, ayant pour effet d’enlever au preneur le bénéfice de la jouissance normale qu’il était en droit d’escompter (Trib.Civil Bruxelles, jugt 3 janvier 2007).
Pour approfondir la question, voir nos banques de jurisprudence.

3. Garantie des vices cachés en matière de contrat d'entreprise :

On peut distinguer deux types de vice en matière de contrat d’entreprise, les vices relevant de la responsabilité décennale et ceux relevant de la responsabilité de droit commun.
Pour les premiers, les vices doivent présenter une gravité certaine et peuvent être par conséquent apparents ou cachés, tandis que pour les vices de droit commun, les vices doivent obligatoirement être cachés.

Pour les vices relevant de la responsabilité décennale (articles 1792 et 2270 du Code civil), les vices doivent affecter la structure d'un édifice ou d'un gros œuvre, et par conséquent doivent présenter une gravité. Il importe donc peut que ces vices soient apparents ou cachés. Le délai de la responsabilité est de 10 ans (article 2270 C. civ.).

Concernant la responsabilité de droit commun pour vices cachés, on peut distinguer deux types de défauts :
- ceux qui rentrent dans le cadre de la responsabilité décennale parce qu’ils présentent une certaine gravité dans la structure de l'ouvrage;
- les vices, dits véniels, qui présentant une caractéristique anormale. Cette caractéristique pouvant être intrinsèque ou fonctionnelle.

La gravité n’est donc pas une condition nécessaire pour mettre engager la responsabilité de droit commun pour vices cachés, mais ils doivent être cachés.
Le vice caché est celui qui n’aurait pas pu être découvert par un maître de l’ouvrage normalement prudent et diligent.
C’est donc un vice qui n’a pas être décelé au moment de la réception provisoire des travaux.
La doctrine rappelle qu'il n’y a pas de présomption de mauvaise foi de l’entrepreneur professionnel et spécialisé, contrairement au vendeur professionnel.

En vertu de l’article 2262bis §1er du Code civil, toutes les actions personnelles sont prescrites par dix, et plus trente ans comme par le passé concernant les vices cachés dits véniels.
Les actions doivent être intentées en temps utiles, ce critère étant laissé à l’appréciation du juge.
Le temps utile, comme le bref délai en matière de vente, oblige le maître de l’ouvrage à réagir dans un délai tel que son inaction ne puisse être interprétée comme une agréation du vice. Le juge tiendra compte de la nature du vice et du comportement des parties.

Pour approfondir la notion de vice caché, nous développons ces matières dans nos différentes banques de jurisprudence.




Jurisprudence


- Vices cachés - Bref délai : Les situations juridiques visées par le contrat de vente, le contrat d'entreprise, le contrat de bail et la responsabilité extracontractuelle ne sont pas comparables, ce qui justifie qu'elles sont soumises à des règles juridiques différentes en matière de vices cachés.
Il convient d'apprécier le bref délai en fonction de la nature du vice allégué et ce, au regard du but poursuivi par le législateur en instaurant cette condition.
Pas de présomption de connaissance du vice : Il ne ressort d'aucune disposition légale qu'un entrepreneur spécialisé est présumé avoir eu connaissance du vice caché dont la chose qui lui a été confiée pour entretien demeure affectée après l'exécution de son ouvrage. Il n'entre pas dans les obligations d'un garagiste de remédier à coup sûr à tout vice caché affectant les organes d'un véhicule (RGDC 2008, p. 44).
Cour d’appel de Mons, Siég.: Lefebve (président) Plaid.: Mes Loth, Baltus et De Wispelaere Loco Lagneaux Arrêt du 24 mars 2005 (1)

Attendu que l'article 1648 du Code civil n'a pas introduit, en matière de vente, une condition spécifique de recevabilité de l'action fondée sur les vices cachés mais a imposé une limite de fond aux droits de l'acheteur (Mons (9ème ch.), 17 septembre 2002, J.T. 2003, p. 68, R.R.D. 2003, p. 13);